L’affaire « Cœur Défense », cet ensemble d’immobilier de bureaux du quartier d’affaires parisien sur lequel les créanciers n’ont pu récupérer leurs mises, a laissé des traces.
Tandis que les loyers des bureaux augmentent à Londres et promettent de s’envoler à Madrid si la reprise se confirme, ils baissent à Paris. A ce constat, déjà dressé par l'investisseur allemand Deka Immobilien à l’ouverture du Mipim, s’ajoutent pour le marché de l’immobilier de bureaux en France des problèmes plus structurels. Il est en effet perçu comme moins sûr en France pour un propriétaire, car les baux y sont moins longs qu’à Londres (où ils atteignent 15 ans voire plus) et le cadre légal y est moins favorable aux propriétaires. Les locataires peuvent aisément renégocier leur loyer à la baisse en cours de bail, chose impossible outre-Manche où il ne peut qu’augmenter, avec un effet de cliquet.
Par ailleurs, « la perception du marché français s’est considérablement dégradée depuis l’affaire Cœur Défense , beaucoup de nos clients l’invoquent pour exclure de s’engager en France », témoigne Cyril de Romance, de First Growth Real Estate (FGREF), basé à Londres, spécialiste de la restructuration de prêts immobiliers complexes et de la gestion de créances. Cœur Défense est une tour du quartier de La Défense dont le propriétaire, Lehman, a été incapable d’honorer la dette d’acquisition (de 1,6 milliard) après sa faillite en 2007. Les créanciers n’ont pu se rembourser en saisissant l’actif car la justice française a validé la mise sous plan de sauvegarde de l’emploi (PSE) de la coquille où était logée la tour. Appliquer le PSE aux coquilles vides utilisées pour loger les actifs financés a été perçu comme un dévoiement du concept et a supprimé toute garantie pour les prêteurs, mais la décision a fait des émules.
L’un des « pires environnements légaux »
« On compte maintenant en France presque une dizaine de décisions de sauvegardes immobilières, poursuit Cyril de Romance. Un exemple est le portefeuille de 15 immeubles de bureau détenus par Kalkalit Portfolio TH SAS, ayant un encours de dette (titrisée) d’environ 230 millions, dont la procédure de sauvegarde a commencé en 2013 ». Paris étant un marché très attractif du fait de sa taille et sa grande liquidité, la barre pourrait être redressée à l’avenir si la loi sur les procédures de sauvegarde était revue. « La France était perçue comme ayant un cadre légal moyennement sûr, à égalité avec l’Allemagne, où il y a aussi des failles. Maintenant la France est tout simplement un des pires des environnements légaux », conclut un grand
conseil.